Parmi les grandes entreprises de la Tech américaine, chacune consacre chaque année 40 milliards de dollars en R&D soit la même somme que l’ensemble des dépenses de R&D en France, tous secteurs confondus.
Verkor , Innovafeed, Exotrail, Iten, Ynsect… enfin les start-up industrielles sont sur le devant de la scène ! Elles bouclent des levées de fonds importantes et intègrent le Next40/FT120. Elles sont identifiées comme le fer de lance de la réindustrialisation en France et sont même érigées en priorité par le Gouvernement.
C’est ainsi qu’après avoir pérennisé le « plan Deeptech », Bpifrance renforce désormais le « Plan start-up et PME industrielles » en lançant le Fonds national de venture industriel destiné à soutenir les projets d’industrialisation portés par des start-up et des PME françaises.
En ce sens, l’Etat joue son rôle en palliant la faiblesse de l’investissement privé. Mais l’Etat ne peut pas tout ! Et on aurait tort d’opposer les start-up et les filières industrielles qui doivent être appréhendées de manière conjointe.
L’écosystème industriel est à l’aube de transformations majeures, à l’image des secteurs du numérique ou de la santé qui ont connu de profondes mutations en voyant les innovations de rupture progressivement être portées par des structures émergentes.
La R&D des grands groupes pharmaceutiques est maintenant externalisée avec succès, dont l’exemple emblématique le plus récent est l’alliance BioNTech/Pfizer. Ou encore, la R&D des géants actuels du numérique qui est, depuis plusieurs années, fondée sur ce même modèle : Google a fait 255 acquisitions majeures en 20 ans.
D’autres secteurs ont suivi le même chemin, tels que la banque et l’assurance, le commerce, les médias, le divertissement. Si le moteur du changement a longtemps été le logiciel, il serait dangereux de croire que l’industrie traditionnelle n’est pas concernée par ce mouvement. On a d’ailleurs vu des leaders, comme Alcatel dans les télécommunications, disparaître en raison de leur incapacité à se restructurer autour des sujets d’avenir.
Les enjeux du monde actuel demandent de développer des solutions innovantes à un rythme très rapide que seules des start-up, agiles et pointues, sont capables de tenir.
Parmi les raisons à cela : aucune contrainte liée à un historique produit ou à une source de revenus à préserver, un objectif simple et unique à poursuivre, une réactivité instantanée aux événements, une capacité d’adaptation immédiate, aucune limitation liée à des processus ou des systèmes d’information anciens, une capacité à attirer les meilleurs talents, un alignement d’intérêts de tous les acteurs, etc.
Ces start-up ne peuvent néanmoins réussir seules. Elles ont besoin de financements. Elles ont besoin d’être alimentées en amont par de la recherche fondamentale et d’être consolidées en aval par des grands groupes, ETI ou PME existants. Leur régime optimum ne dure en effet qu’un temps.
Les Etats européens ont beau lancer différents types de programmes d’investissement, ces financements restent insuffisants. Parmi les grandes entreprises de la Tech américaine, chacune des plus importantes dépense chaque année 40 milliards de dollars en R&D, soit la même somme que l’ensemble des dépenses de R&D en France, tous secteurs confondus.
C’est pourquoi il est nécessaire de parvenir à déployer rapidement et efficacement les innovations de rupture dans l’ensemble des filières industrielles, de l’amont à l’aval (matériaux, composants, logiciels, data etc.), en synergie avec les laboratoires de recherche.
Dans le secteur de l’énergie par exemple, tiré par des leaders mondiaux comme Engie ou TotalEnergies, nous avons une industrie très compétitive. Pour maintenir notre avance nous devons investir massivement dans les start-up de la transition énergétique et dans toutes les technologies de rupture utiles de près ou de loin à cette industrie.
Si les filières industrielles ne prennent pas d’initiatives en ce sens et ne sont pas soutenues par les investisseurs institutionnels, les Français et les Européens ne pourront pas suivre le rythme et notre déclassement serait alors inévitable.
Jérôme Faul, président du directoire d’Innovacom.