Il est plus intéressant pour une grande entreprise (ou corporate) d’investir dans des fonds de capital-risque aux côtés d’autres corporate que de mener cette démarche en solitaire.
Rappelons que la valeur d’un réseau est une fonction quadratique du nombre de membres. Elle augmente comme son carré. C’est une loi empirique formalisée par Robert Metcalfe – fondateur de 3Com – dans les années 1990.
En effet, si la valeur du réseau est proportionnelle au nombre de relations possibles, avec N membres, chacun est en relation avec N-1 membres, cela donne donc N*(N-1)/2 relations possibles (il faut diviser par 2 car si un membre A est en relation avec un membre B, la même relation existe entre B et A). Quand N est grand, N² est beaucoup plus grand que N.
La valeur est donc grosso modo proportionnelle à N². Une bonne partie du succès des réseaux de télécom puis des réseaux sociaux s’explique ainsi.
Des corporate qui investissent dans des startups aux travers de fonds de capital-risque sont intéressés par accélérer et diversifier leur accès à l’innovation. Le travail fait ensemble est créateur d’énormément de valeur et la valeur d’une startup qui a une clientèle entreprise dépend directement du nombre de clients et partenaires de type « grand compte » qu’elle a.
Ces clients ou partenaires, les startups les trouvent de façon préférentielle parmi les corporate qui ont investi dans les fonds de capital-risque qui les financent (on parle de corporate venture capital ou CVC).
Formalisons un (tout petit) peu le sujet. Compte-tenu de la nature propriétaire du fonds de CVC, si un fonds gère en moyenne un nombre P de startups, chaque corporate aura accès à un nombre P de startups propriétaires. La valeur de chaque fonds sera proportionnelle à P.
S’il y a N corporate, avec N fonds, la valeur de l’écosystème est proportionnelle au nombre de relations créées soit N*P.
Que se passe-t-il si ces N corporate décident d’investir dans un même fonds (multi corporate) plutôt que chacun séparément ?
Ils ont la capacité de gérer ensemble N*P startups – chacune d’entre elle ayant la capacité de travailler avec N corporate. Le nombre de relations est donc de N*N*P, la valeur de l’écosystème est proportionnelle au nombre de relations créées soit N*N*P.
Pour des mêmes montants investis, le même nombre de corporate impliqués et le même nombre de startups financées, le passage d’un modèle de fonds corporate à un modèle de fonds multi corporate permet donc de valoriser l’écosystème comme une fonction quadratique et non pas linéaire du nombre d’investisseurs.
Du point de vue même du corporate, le gain est meilleur même s’il doit être partagé en N, il n’est plus proportionnel au seul nombre P de startups qu’il aura pu soutenir mais proportionnel à N*P c’est-à-dire également au nombre N de corporate partenaires du fonds.
C’est un système où tout le monde gagne.
CQFD : du point de vue de l’écosystème comme du point de vue des entreprises, il faut favoriser un modèle de fonds multi corporate et non pas un modèle de fonds corporate avec un sponsor unique.